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Écosystème #Interview

L’équilibre économique d’une filière passe par le dialogue, pour Laurent Proy, président de la UFIPA

07.01.2022
L'UFIPA (Union de la Filière Papetière) regroupe 61 entreprises pour 25 000 salariés et représente la filière papetière, des fabricants de fournitures scolaires ou de bureau et des distributeurs. Elle lance un appel aux acheteurs publics et privés à renégocier les contrats pour tenir compte des hausses des matières premières et des coûts de fabrication. Un aménagement des délais d’exécution est aussi demandé par Laurent Proy, président de l'UFIPA

Pourquoi avoir lancé votre alerte sur la flambée des prix des matières premières en direction des pouvoirs publics et des clients ?

Laurent Proy, président de l’UFIPA

 

Toutes les filières industrielles sont confrontées aujourd’hui à deux sujets majeurs qu’elles ne maitrisent pas et qui sont : la hausse des matières premières (la pâte à papier, le bois, le carton, l’acier, les composant chimiques) – qui se répercute en cascade – et également les coûts de transformation liés à l’énergie, le transport, la main d’œuvre et la distribution. Cette situation affecte tous les produits que nous distribuons …

Parmi les propositions, vous suggérez de déplafonner les clauses de révision des prix et un effacement des pénalités en cas de retard des livraisons, pensez-vous pouvoir être entendu ?

Tout d’abord, nous souhaitons, comme beaucoup d’autres professions , sensibiliser les différents acheteurs professionnels et les consommateurs sur la nécessité de répercuter ces hausses en ayant une discussion ouverte, et ceci afin de préserver l’équilibre de tout un système économique.

Il faut que le donneur d’ordre et l’utilisateur soient conscients que ces hausses sont une nécessité pour équilibrer une filière .

La dimension RSE prend en compte les attentes des parties prenantes. Je suis convaincu que l’équilibre économique de toute une chaine de valeur, du fabricant au distributeur , du distributeur au client final , voire à l’utilisateur ,en fait partie. Dans le contexte actuel, les distributeurs ont pris en compte les difficultés et les hausses des fabricants et doivent les répercuter au risque de se mettre eux même en difficultés.  Il en va de même pour les difficultés d’approvisionnement que nous rencontrons actuellement. Notre filière papetière n’est pas épargnée.

La consommation de plusieurs matières premières dont les prix ont flambé : la pâte à papier (+60% entre septembre 2020 et septembre 2021), le polyéthylène (+67% entre septembre 2020 et septembre 2021), l’aluminium (+57% entre septembre 2020 et septembre 2021) et le carton (+30% entre septembre 2020 et septembre 2021), sont utilisés pour la fabrication des produits et rendent la filière papetière particulièrement vulnérable

Pourquoi souhaitez-vous aussi que les indices d’indexation soient actualisés en temps réel ?

Le message le plus important que nous souhaitons faire passer est à destination des acheteurs publics que ce soit pour les marchés de l’état, des régions, départements et des collectivités territoriales. Par définition, ces contrats de distribution sont encadrés par le code des marchés publics. Il existe des modalités de révision de prix qui permettent de recalculer les tarifs , chaque année, à la date anniversaire du contrat, en fonction d’indices répertoriés par l’INSEE,

D’une part,  ces indices ne sont pas toujours mis à jour en temps réel et surtout les clauses de révision sont encadrées par une clause limitative dite de sauvegarde ou clause butoir , autrement dit un % maximum d’augmentation qui ne peut être dépassé au risque d’entrainer la résiliation de l’accord-cadre .

Prenons l’exemple d’un cahier dont la matière principale est le papier, et auquel il faut ajouter l’augmentation des couts de fabrication.  Dans la grande majorité des contrats, la clause butoir est souvent capée à 3 ou 4 % maximum . Mais la pâte à papier a , elle, bien augmenté de plus de 60% sur 10 mois.  Vous comprenez l’écart et l’enjeu !!

De plus, dans la commande publique, il existe des clauses stipulant que le paiement n’interviendra qu’après exécution complète de la prestation issue d’une commande. Or il arrive que la commande ne puisse pas être livrée en totalité , faute de produits… C’est pourquoi, Il faut que nous puissions en discuter avec les pouvoirs publics pour mieux expliquer les problématiques actuelles, et trouver des solutions viables .
J’insiste donc sur l’importance de la qualité de la relation clients et fournisseurs , ainsi que sur les valeurs d’éthique et de confiance à partager avec les acheteurs responsables.

C’est bien là, la dimension sociétale qui doit prévaloir à nos échanges …

Comment voyez-vous l’avenir dans les mois qui viennent, cette crise va-t-elle durer ?

Je n’ai pas de boule de cristal mais ma conviction est que le retour à une situation stable n’est surement pas pour l’année 2022. Nous sommes confrontés à des pénuries de matières, et à un contexte inflationniste qui s’installe durablement.
En plus dans le contexte spécifique de la filière papetière, le trend de la consommation est à la baisse .

Ces appels à la discussion ne sont-ils pas purement juridiques ?

Bien au contraire, c’est dans cette relation de partenariat et de responsabilisation que nous voulons ouvrir le dialogue sur les clauses limitatives. Les éléments et arguments juridiques ayant trouvé là leur limite.

Les distributeurs se sont engagés à servir les marchés en fonction du contexte économique établi au moment de la consultation . Aujourd’hui, il est admis que le bouleversement lié au contexte pandémique et à ses conséquences n’était pas prévisible lors de la contractualisation d’un marché.

En effet, La conjonction de différentes causes telles que la raréfaction des matières, le niveau de hausse des prix , l’allongement des délais d’acheminement étaient impossibles à anticiper.

Ces différentes causes relèvent bien de la théorie de l’imprévision, celle-ci étant encadrée par la jurisprudence administrative.

Cette hausse se conjugue à une augmentation mondiale des couts de transformation et de distribution : entre octobre 2020 et septembre 2021 le cout des emballages cartons a subi une hausse de 30% et le prix moyen du conteneur a augmenté de 350% selon l’indice World Container. Quant au cout relatif à l’Energie, on peut parler de spirale inflationniste en 2021.

Union de la Filière Papetière https://www.ufipa.fr/

Propos recueillis le 23 décembre 21 par Patricia de Figueiredo

 

 


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