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Écosystème #Interview

Le papier restera une valeur refuge, selon l’imprimeur parisien Didier Martin.

20.05.2020
Dernière imprimerie industrielle de Paris intra-muros, Frazier fait partie du groupe Firopa qui comprend 22 sociétés basées en France, couvrant tous les domaines des imprimeries de labeur et numérique. Son président Didier Martin dirige Frazier Paris avec son directeur général Daniel Bouyerden. Ils revendiquent que le papier et l’imprimé devraient demeurer des actifs essentiels de notre souveraineté nationale.

De quelle manière la société a été impactée durant le confinement ?

Nous avons été en pause techniquement pendant deux semaines même si une partie des salariés était en télétravail. L’imprimerie a repris la production le 6 avril. Depuis nous fonctionnons à 25 salariés depuis le 11 mai alors qu’en temps normal nous sommes 45.

 

Comment papier a-t-il compté dans votre confinement ?

Notre premier réflexe a été d’être connecté : télévision et réseaux sociaux. Puis est arrivée une overdose : trop d’informations, trop de stress.  Dans un second temps le papier est réapparu, avec la lecture pour ralentir. Personnellement, j’ai replongé dans ma bibliothèque et acheté chez les marchands de journaux restés ouverts durant cette période qui s’est avérée plus stabilisante. Les kiosques ont vu leurs achats de magazines augmenter de 30% environ. Pour notre part, nous imprimons quelques magazines et nous avons continué.

Pendant le confinement, le temps a pris une autre dimension. Le papier a permis de revoir les choses et d’approfondir certains sujets, d’être plus constructif. Ainsi, nous recevions énormément de prospectus dans notre boîte aux lettres qu’on ne lisait pas toujours. Mais le numérique nous a tellement envahi, que désormais quand je reçois un imprimé publicitaire, je suis content de le toucher et j’y porte une attention particulière.

 

Quel rôle le papier peut-il tenir dans l’après Covid et participer à la reprise ?

Tout ce que nous imprimons actuellement est en lien avec la reprise. Le papier est le support privilégié pour diffuser de l’information, guider et former le personnel ou le client. Des enseignes aussi différentes que Franprix, la RATP ou le Bon marché l’ont comprises. C’est un moyen rapide d’aller à l’information dans un magasin, ne serait-ce que par l’affichage avec des pictogrammes ou les gestes barrières. Nous avons imprimé des books d’information pour des sociétés.

Si le papier peut reculer momentanément, pour des raisons purement économiques avec un arbitrage au dépend de la communication, un équilibre reviendra.

Un effort sur la sensation qu’apporte le papier est visible. Il existe une volonté de se démarquer de la part des entreprises avec des demandes de formats ou de touchers différents pour créer une véritable sensation, au contraire du numérique qui reste abstrait.

 

Pensez-vous que nous allons assister à une vague relocalisation de nos industries ?

Certains avaient pris les devants à l’image du Magazine GRAFFITIART, que nous imprimons. Relancé il y a quelques temps avec une vraie volonté d’imprimer en France en adéquation avec leur discours sur l’art en France.

Notre société a initié un logo : « Fabriqué en France » (on aurait pu mettre « fabriqué à Paris ! »). Une prise de conscience est apparue durant ces deux mois, de notre trop grande dépendance à la Chine. Une conscience collective s’est manifestée qui concerne aussi le papier.

 

Quels types d’innovations attendez-vous de l’écosystème du papier face aux nouveaux enjeux qui se profilent ?

Le papier connecté est une piste prometteuse. Notre groupe a déjà créé une application téléchargeable ‘Firoprint’ qui permet, via votre smartphone, de scanner une page ou une partie d’une page et de renvoyer vers une vidéo. Le papier doit trouver une nouvelle place, complémentaire au numérique. Cela passera aussi par l’imprimé réactif ou sécurisé avec les puces RFID. Les innovations ne sont pas seulement technologiques, mais elles doivent concerner également la fabrication du papier. Avec la fermeture des usines d’ArjoWiggins, nous avons perdu des gammes de recyclés, or Il est nécessaire de disposer d’un renouvellement des textures.

Le client attend des sensations et des nouveautés.

 

Dans cette disruption sociétale accélérée, quelle est votre proposition pour que le papier ait sa place dans le ‘capitalisme numérique ?

Le numérique est-il le satellite du papier ou l’inverse ? Le papier restera une valeur refuge. L’arrivée de la RSE engage la responsabilité de nos clients et de nous-mêmes sur tous les sujets économiques.

Un vrai comparatif RSE doit être fait entre le papier et le numérique.

L’impact de la pollution du numérique commence à être pris sérieusement.  Nous industriels du papier, on nous a fait passer pour des abatteurs de forêts pendant des années de la part des industries numériques ! En réaction nous avons développé de nombreux labels : Imprim’Vert, PEFC, FSC, PrintEthic. Nous savons désormais mesurer et maitriser notre impact écologique. De plus, le papier est recyclable, de grands progrès ont été réalisés sur les encres, les vernis.

Est-ce que l’impact écologique du numérique peut s’améliorer ? Il est temps de se pencher sur les capacités des GAFAM a progressé dans ce domaine.

 

 

 

 

 

 

Propos recueillis le 12 mai 2020 par Patricia de Figueiredo

 


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