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Écosystème

La lettre d’info #10 de l’Association

06.07.2023
L’association Culture Papier est engagée depuis sa création en 2010 en faveur de la promotion des valeurs et vertus du papier et de l’imprimé. Vaste programme selon l’expression célèbre de De Gaulle (le général, pas Laurent le 1er président de l’association). Notre combat est culturel et même civilisationnel dans le sens où ce ne sont pas simplement des centaines de milliers d’emplois, des milliers d’entreprises et la transmission de savoir-faire qui sont menacés mais aussi, comme le démontrent de plus en plus d’études scientifiques, nos capacités cognitives et au delà notre santé mentale. Le “grand remplacement” des supports papier (presse, supports d’enseignement, documentations diverses…) par des solutions numériques est le plus souvent une hérésie environnementale (la lecture de l’essai de “l’enfer numérique, voyage au bout d’un like” (Éditions les liens qui libèrent) de Guillaume Pitron devrait être rendu obligatoire !) et un choix dont les conséquences psychiques et sociales commencent tout juste à être mesurées. L’engagement de Culture Papier tient en une formule simple : la vérité, seulement la vérité. Sur les conséquences environnementales, psychiques, sociales, pédagogiques, industrielles… de la fameuse dématérialisation. Et quand la vérité triomphera face aux approches idéologiques ou guidées par certains intérêts économiques, le papier et l’imprimé triompheront eux-aussi.

La lettre d’info #10 du 6 juillet 2023 – Par Jean Philippe Zappa

PAPIER ET DÉFORESTATION : LE POINT SUR LES IDÉES REÇUES !

Matériau naturel, le papier est fabriqué à partir de fibres de cellulose, issues soit du bois, soit du recyclage. La filière papetière s’inscrit donc dans la chaine de valeur du bois. Face aux enjeux du changement climatique, notre regard sur la forêt change : comment la forêt peut-elle résister, s’adapter, comment la gérer durablement… ? Elle est, en effet, un formidable écosystème qui permet la captation du carbone, un réservoir de biodiversité, mais aussi une ressource utile à bon nombre d’activités humaines ! Entre mythe et réalité, faisons le point sur une question récurrente… Le papier est-il responsable de la déforestation ?

L’agriculture : première cause de déforestation sur la planète
Selon le rapport sur l’État Mondial des Forêts publié par l’Organisation des Nations Unies pour l’Alimentation et l’Agriculture (FAO) en 2016, c’est l’agriculture qui arrive en tête des causes de la déforestation mondiale avec un chiffre de presque 80% (agriculture locale et commerciale cumulées), loin devant la construction d’infrastructures, d’activités minières ou d’urbanisation. En cause principalement : des modèles agricoles qui détruisent les forêts tropicales au profit de plantations de palmiers à huile ou de culture de soja destiné au bétail. Le Brésil détient, à ce titre, de tristes records depuis plusieurs années. Ce sont ainsi des milliers d’hectares qui sont partis en fumée…libérant dans l’atmosphère une grande quantité de CO2.

On ne coupe pas d’arbres pour faire le papier !
Non, contrairement à une idée largement répandue, pour la production de fibres vierges de papier on utilise majoritairement les coupes d’entretien des forêts -que l’on nomme coupes d’éclaircie. Le reste provient des résidus de bois des scieries. Le papier permet donc de valoriser des sous-produits de la filière bois…selon un principe de « zéro gaspillage » !

Recyclage : la filière papetière engagée dans l’économie circulaire
La principale ressource pour produire du papier est…. Le papier usagé ! En effet, la fibre de cellulose permet son recyclage environ 5 fois avant d’être trop dégradée. C’est pourquoi l’industrie papetière produit de la pâte à papier par recyclage des papiers triés et collectés. Et cela représentait en 2019, selon la COPACEL, 71,3% des approvisionnements de l’industrie papetière française, un chiffre bien supérieur à l’approvisionnement en bois (fibres vierges) et qui démontre la logique circulaire de ce secteur.

La certification, garantie d’une gestion durable de la forêt et de la filière papier
Pour garantir une gestion forestière durable ainsi qu’une transparence de la chaîne de contrôle, la filière bois et l’industrie papetière ont développé depuis une vingtaine d’années un système de certifications reconnues. Les deux labels les plus connus sont FSC® et PEFCTM.
En 2015, la FAO recensait 52% des forêts du monde faisant l’objet d’une gestion contrôlée. Et en 2017, 71% du Bois et 83% de la pâte achetés par l’industrie européenne de la pâte et du papier étaient certifiés FSC ou PEFC. (source : analyse des données FSC et PEFC par Two Sides).

Imprimés responsables : les bons réflexes
Le bon réflexe est donc, pour les entreprises et les collectivités, de s’assurer d’un approvisionnement et d’un usage responsable du papier. Un imprimé ne pourra afficher un label FSC ou PEFC que s’il est issu d’une chaîne de production ininterrompue d’entreprises contrôlées et dont 70% des fibres de bois sont certifiés.

Lire aussi : Quels labels pour des imprimés responsables ?
Le papier graphique est un formidable support de communication et un matériau qui s’intègre parfaitement dans une économie circulaire. Bien entendu, comme toute activité, il a un impact, mais le digital n’en a pas moins, même si cela ne se voit pas ! Pour faire bon usage du papier, les certifications garantissent la croissance saine et renouvelée des forêts… D’ailleurs, entre 2005 et 2015 en Europe, toujours selon la FAO, la surface des forêts a augmenté d’une surface équivalente à… La Suisse !

 

LA LECTURE DE L’ÉTÉ

Guillaume Pitron livreDans “l’enfer numérique, voyage au bout d’un like” qui vient de sortir en version poche (Editions les liens qui libèrent), Guillaume Pitron révèle l’anatomie d’une technologie qui n’a de virtuel que le nom. Dans une enquête fouillée, le journaliste rappelle les origines du numérique et explique comment ce nouvel outil de la communication a des conséquences catastrophiques sur notre environnement. Et qui, sous couvert de limiter l’impact de l’homme sur la planète, s’affirme déjà comme l’un des défis environnementaux majeurs du XXIe siècle.

Pendant deux ans, il a suivi, sur quatre continents, la route de nos e-mails, de nos likes et de nos photos de vacances. Son ouvrage nous conduit dans les steppes de la Chine septentrionale à la recherche d’un métal qui fait fonctionner nos smartphones, mais aussi dans les vastes plaines du cercle arctique où refroidissent nos comptes Facebook, et dans l’un des Etats les plus arides des Etats-Unis, pour enquêter sur la consommation d’eau de l’un des plus grands centres de données de la planète, celui de la National Security Agency (NSA).

« Nous avons découvert qu’Internet a une couleur (le vert), une odeur (de beurre rance), et même un goût, salé comme l’eau de mer. Il émet également un son strident, semblable à celui d’une immense ruche. Bref, nous avons fait l’expérience sensorielle de l’univers numérique, prenant par là même la mesure de sa démesure. »
Guillaume Pitron, extrait de l’Enfer numérique, voyage au bout d’un like

4 % des émissions globales de CO2
Pour envoyer un simple like, nous déployons ce qui sera bientôt la plus vaste infrastructure jamais édifiée par l’homme, un royaume de béton, de fibre et d’acier, un inframonde constitué de datacenters, de barrages hydroélectriques et de centrales à charbon, tous unis dans une triple quête : celle de puissance, de vitesse et… de froid.

L’industrie numérique a beau vanter son tribut positif à la préservation de la planète compte tenu des fabuleux leviers d’optimisation de nos méthodes agricoles, industrielles, « servicielles » qu’elle permet, la réalité est moins enchantée : la pollution numérique est colossale, et c’est même celle qui croît le plus rapidement. Elle est d’abord due aux milliards d’interfaces constituant notre porte d’entrée sur Internet, mais provient également des données que nous produisons à chaque instant.

Les chiffres sont édifiants : l’industrie numérique mondiale consomme tant d’eau, de matériaux et d’énergie que son empreinte est le triple de celle d’un pays comme la France ou l’Angleterre. Les technologies numériques mobilisent aujourd’hui 10 %de l’électricité produite dans le monde et rejetteraient près de 4 % des émissions globales de CO2, soit un peu moins du double du secteur civil aérien mondial.

« La pollution digitale met la transition écologique en péril et sera l’un des grands défis des trente prochaines années. » Une course est désormais engagée : d’un côté, les entreprises du numérique déploient leur formidable puissance financière et d’innovation pour optimiser et « verdir » Internet. De l’autre, des réseaux et communautés de défricheurs pensent qu’un autre numérique, plus sobre, responsable et respectueux de l’environnement est possible.

Par quelles technologies de l’information voulons-nous en effet être accompagnés vers l’avenir ? Fabriquées selon quels procédés et avec quels matériaux ? Souhaitons-nous un réseau central, constitué de lourdes infrastructures permettant des gains énergétiques d’échelle, ou plutôt éclaté afin de relocaliser la transmission des données, grosse consommatrice d’électricité ? Le voulons-nous neutre et dérégulé, ou bien partial, voire liberticide, car n’autorisant que la production de data jugée essentielle ? Devra-t-il être payant ou gratuit ? « Nos rues de l’avenir seront probablement une hybridation de ce large éventail de solutions qui fermentent aujourd’hui aux quatre coins du monde. »

Guillaume Pitron, L’enfer numérique Voyage au bout d’un like Editions Les liens qui libèrent


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