Accueil>Nos actions>Le Blog #Lepapieraufutur>Je regrette profondément ce débat clivé entre le papier et les octets, Frédéric Bordage.
Société #Interview

Je regrette profondément ce débat clivé entre le papier et les octets, Frédéric Bordage.

18.03.2021
Frédéric Bordage, créateur de la communauté Green IT, plaide pour un numérique responsable. Auteur de plusieurs livres, ce lanceur d'alerte milite pour que La sobriété numérique (Buchet Chastel, 2019) soit enfin adoptée. Il fait un point sur son engagement en regrettant que chaque partie - papier, numérique- campe sur des positions trop tranchées.

La nécessaire « sobriété numérique » que vous recommandez est-elle assez entendue ?

Frédéric Bordage, créateur de la communauté Green IT

Compte tenu de l’ampleur du sujet j’aurais tendance à répondre : non. Nous n’avons jamais été autant entendus. Mais en même temps, nous ne voyons pas de changement majeur se produire dans les comportements.

Rappelons que le numérique est une ressource non renouvelable, qui s’épuise donc inéluctablement, et trop vite :
il reste une à deux génération(s) de stock. Qu’adviendra-t-il ensuite ? 

Quels progrès restent encore à faire ? et quels sont les plus réfractaires à vos recommandations ?

Le principal progrès à faire est celui d’une information de qualité. Depuis 17 ans, la communauté s’auto-régulait plutôt bien pour limiter le greenwashing. Mais depuis quelques années, le sujet est devenu « bankable ». Une horde de pseudo experts déferle actuellement. Plus que les réfractaires, ce sont ces opportunistes et leur greenwashing qui sont le véritable danger. Ils créent un bruit infernal, chacun, chacune y allant de son livre, de son vocabulaire, etc.

La critique permanente sur le papier, notamment le dernier combat en date contre l’imprimé publicitaire avec l’article 9 de la loi Climat, ne cache-t-elle pas les vraies causes de l’empreinte environnementale ?

Les dernières analyses du cycle (ACV) de vie parues, dans un camp comme dans l’autre, sont complètement à charge. Je regrette profondément ce débat clivé entre le papier et les octets. Cela nous fait perdre beaucoup de temps que nous n’avons pas vis-à-vis du climat, de la biodiversité et de l’épuisement des ressources abiotiques. Il n’y a pas un support « meilleur » que l’autre. Chacun a des avantages et des inconvénients d’un point de vue environnemental et en terme de création de valeur ajoutée.

Par ailleurs, la plupart du temps ce n’est pas le support en lui-même qui fait la différence, mais son usage. Un livre emprunté à la bibliothèque a nettement moins d’impacts qu’un livre lu sur une tablette par exemple. C’est donc la mutualisation du support qui réduit les impacts. Pour prendre un autre exemple, ni le ticket de caisse papier, ni sa version PDF envoyée par mail ne sont une solution. La solution c’est de ne pas générer de ticket de caisse du tout en dessous d’un certain montant et / ou de permettre au client de le générer à la demande sur le portail de l’entreprise.
Enfin, ne perdons pas de vue que plus que l’imprimé publicitaire en lui-même, c’est la surconsommation qu’il engendre qui pose principalement problème. C’est également vrai pour la publicité en ligne.

Propos recueillis le 17 mars 2021

Pour aller plus loin : www.greenit.fr

 


Continuer la lecture