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Innovation #Interview

Il faut donner de la valeur au carbone, pour Benoît Moreau, fondateur d’Ecograf

10.02.2021

Après 15 années en tant que responsable environnement de l’UNIIC, Benoît Moreau crée Ecograf, entreprise de conseil pour accompagner les imprimeurs et toutes les parties prenantes de la chaîne graphique dans la définition et la mise en place d’une stratégie environnementale. Il déploie en France et en Europe Climate Calc, l’outil de quantification de l’empreinte carbone dédié aux industries graphiques.


Quels sont les clients d’Ecograf ?

La clientèle d’Ecograf était initialement exclusivement composée d’imprimeurs français, italiens ou espagnols. Depuis 5 ans, le marché se développe principalement sur les imprimeurs étrangers (Allemagne, Pologne, Pays Baltes) et sur les donneurs d’ordre français, éditeurs (littérature et presse magazine), banques/ assurances…

En ce qui concerne l’évaluation de l’empreinte carbone, je regrette de voir que les imprimeurs français qui avaient une certaine avance dans les années 2010 sont en train de la perdre face à leurs clients ou à leurs concurrents étrangers. Je suis inquiet de voir que de très gros imprimeurs baltes qui ont des vues sur le marché français sont aujourd’hui capables, à l’inverse des imprimeurs français, de proposer l’estimation systématique des émissions générées par les livres qu’ils impriment ou vont imprimer. En revanche, j’observe un développement de l’intérêt des imprimeurs de PLV français.
Être à même de réaliser des simulations pour optimiser l’empreinte carbone d’un produit avant son impression,
ou pour proposer à ses clients de compenser leurs émissions devient, à mon avis, de plus en plus important.

Les imprimeurs se sont doté de Climate Calc, mais pourqu’elle finalité ?

ClimateCalc est un outil européen créé en 2010 par les Fédérations d’imprimeurs français, danois, belges, britanniques, néerlandais et finlandais. L’outil, dédié aux industries graphiques, permet d’évaluer les émissions de gaz à effet de serre d’un site d’impression/transformation et des produits réalisés.

La première fonction de Climate Calc est d’aider les imprimeurs à réduire leurs émissions de CO2.


Cette méthode, partagée au niveau européen, permet de garantir la qualité des évaluations produites. Une des autres forces de ClimateCalc réside dans sa capacité à considérer les émissions générées par chaque sorte de papier (marque/fournisseur/papeterie) utilisé. Contrairement à d’autres outils, ClimateCalc ne considère pas de données moyennes pour le papier/carton.

Les résultats sont parfois étonnants et contre-intuitifs ?

Oui, il faut se méfier des a priori. Ainsi, souvent on constate que la somme des émissions générées par le transport du papier des papeteries vers le site d’impression est souvent supérieure à la somme des émissions générées par les expéditions des produits finis. De la même façon, on peut trouver plus de différence d’émissions entre deux papiers fibres vierges de même catégorie qu’entre un papier recyclé et un papier fibres vierges. Il est important, si l’on veut réduire ses émissions, de s’appuyer sur des données précises et vérifiées

Comment procédez-vous pour vos évaluations ?

La première étape consiste à collecter les données de consommations et d’activités du site pour une année. Cette collecte est relativement aisée et rapide. Une fois réalisée l’estimation de la totalité des émissions générées par le site, on peut alors estimer l’empreinte carbone de produits spécifiques. Une mise à jour annuelle doit être effectuée ; celle-ci permet de mesurer l’efficacité des actions de réduction.
Afin de valoriser ces actions auprès de ses clients, et donc d’éviter toute frustration, je me permets d’insister sur le fait qu’il est fondamental d’impliquer l’équipe commerciale. Les commerciaux doivent avoir conscience de l’intérêt de la démarche entreprise, doivent la comprendre, afin de la promouvoir auprès de leur portefeuille.

Arrive-t-on à mesurer l’impact CO2 du digital, et en tirer les conséquences ?

De plus en plus d’études sortent sur le sujet notamment grâce à The Shift Project, Institut du numérique responsable (INR). L’Ademe possède également des données.
On commence à prendre conscience de l’impact du numérique sur l’environnement en général et sur les émissions de gaz à effet de serre en particulier. La force de l’imprimé, en ce qui concerne le carbone, réside dans le fait que grâce à l’implication des papetiers, des imprimeurs, des fournisseurs d’encres, de plaques offset, des transporteurs, nous avons des données robustes qui nous permettent d’estimer nos émissions. Nous pouvons calculer l’empreinte carbone d’un livre, d’un magazine, d’une campagne de communication imprimée. Aujourd’hui, le monde du numérique n’est pas capable de transmettre une information aussi pointue.

La chaîne graphique connaissant précisément ses émissions, elle est capable de les réduire.
Pour le numérique, comment savoir où l’on va, si l’on ne sait pas d’où l’on part…

Comment avez-vous accueilli l’ACV Quantis pour la Poste/Médiapost ?

Cette étude existe et c’est positif. J’ai une frustration en ce qui concerne l’absence de définition, au moins dans la synthèse qui a été diffusée, de l’unité fonctionnelle.
En effet, je pense que le cœur du problème réside dans l’efficacité de la campagne de communication. Je m’explique : quand je diffuse un prospectus, l’idée est de développer ma zone de chalandise et de faire venir des clients en magasin. Ce qui m’intéresse c’est de connaître l’augmentation de mon chiffre d’affaires générée par ce prospectus. J’aurais tendance à dire que si votre prospectus ne vous apporte aucun bénéfice, surtout ne l’imprimez pas. De la même façon, si une campagne de mails est aussi efficace qu’une campagne imprimée qui va vous coûter beaucoup plus chère, choisissez les mails. J’aime beaucoup l’étude réalisée par Leroy Merlin qui est justement partie de la mesure de l’efficacité des différents canaux de communication et qui a construit non pas une politique unique mais une politique qui s’adapte à la situation de chaque magasin.
En conclusion, je pense, qu’il est plutôt intéressant de partir de la mesure de l’efficacité et celle-ci une fois démontrée de mettre en place les démarches qui permettront de diminuer son impact environnemental.

Pour en savoir plus sur : http://www.ecograf.fr et Climate Calc,

Propos validés le 10 février 2021 recueillis par Patricia de Figueiredo


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