[Edito] La suppression des tickets de caisse, l’arbre qui cache la forêt
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RSE #Tribune

[Edito] La suppression des tickets de caisse, l’arbre qui cache la forêt

07.05.2021
Plus la fibre (de bois) est grosse ; plus elle est utilisée pour faire avaler de grosses ficelles. Après la facture courrier, l’imprimé publicitaire, la suppression des tickets de caisse est justifiée par le nombre fallacieux d’arbres soi disant « sauvés ». Toujours au profit de supports digitalisés, sans réelle évaluation des impacts environnementaux ou de réalité de recyclage, et surtout plus intrusifs en captant  nos données personnelles. Soyons vigilants pour le maintien du choix des consommateurs avec le prochain décret d’application.

Des tickets de caisse émis que si le client en fait la demande.

L’article 49 de la Loi AGEC est venu compléter l’article L. 541-15-10 du code de l’environnement en « interdisant au plus tard le 1er janvier 2023, et sauf demande contraire du client : l’impression et la distribution systématiques de tickets de caisse dans les surfaces de vente et dans les établissements recevant du public, de carte bancaire, de tickets par des automates, de bons d’achat et de tickets visant à la promotion ou à la réduction des prix d’articles de vente dans les surfaces de vente. »

Si le décret qui doit venir préciser son application est encore attendu, certains enseignes comme Carrefour n’écoutant que leur responsabilité s’engouffrent dans la brèche au nom « une nouvelle étape de sa feuille de route zéro-gaspillage », et de « renforcer son engagement en matière de lutte contre la déforestation » et annonce « pour les Clients porteurs de la carte fidélité qui en font la demande, [que] le traditionnel ticket de caisse papier est remplacé par un ticket dématérialisé, accessible en ligne ».

Culture Papier souhaite mettre en perspective les risques de ce tour de passe-passe papier/digital et appelle que le décret d’application maintienne le choix du consommateur et à sa protection pour ne pas se faire capter – sans un usage strictement limité – ses données personnelles.

Eviter une triple peine pour le consommateur

Ne nous y trompons pas, la manip’ de com – usée jusqu’à la fibre de bois depuis des décennies au nom d’une ‘vertueuse déforestation’ – constitue encore et toujours après la facture papier et l’imprimé publicitaire, la même triple « peine » pour le consommateur ;

  1. Se faire tromper par l’usage d’un sophisme abusif : Une mathématique hasardeuse (puisque tout dépend de la partie de l’arbre concernée) persiste à s’imposer ; « Un arbre adulte abattu produit environ 40kg de papier » proclame sans preuve stoppub.fr pour étayer qu’une « économie » d’une tonne de papier revient à « sauver de l’équivalent » 25 000 arbres… » Comme si le bois d’ arbre n’avait qu’un seul usage! Ce calcul d’enfant au doigt mouillé ne correspond à aucune réalité, ni environnementale, ni industrielle. Le papier est issu des déchets de l’arbre, et « tout est bon dans l’arbre ». Rien n’est perdu. La preuve ? Le bois (d’oeuvre) constitue le meilleur matériau responsable pour la construction
  2. Se faire piquer sans frais son adresse mail (qui vaut consentement RGPD) pour ensuite recevoir quotidiennement des tombereaux de promotions par mail ; cet harcèlement comme la gestion de ses données personnelles ne fait jamais l’objet d’une évaluation sérieuse d’impact environnementale, rarement  mentionnés par les champions de la « feuille de route zéro-gaspillage » Deux poids, deux mesures, qu’assume Carrefour, alors que l’impact du digital sur l’environnement et son usage croissant constituent une préoccupation majeure du débat public. En témoignent certaines ONG – GreenIT, Shift  Project – qui tirent l’alarme depuis une décennie sur une nécessaire sobriété numérique. Entendons autant les zélateurs de la loi Climat & Résilience » pour alerter sur le poids du numérique et soutenir le projet de loi visant à réduire l’empreinte environnementale du numérique voté par le Sénat le 13 janvier et désormais sur le bureau de l’Assemblée nationale ?
  3. Faire de meilleurs ROI à leur commerçant sans contrepartie ; avec la facturette dématérialisée, le client perd un service instantané, celui de vérification de ses achats ; les erreurs sont nombreuses, mais aussi les indispensables « preuves d’achats » (échanges, garanties, assurance, notes de frais…), En reportant la charge de la preuve et de l’impression sur lui, le marchand améliore son ROI à bon compte (en omettant que les serveurs nécessaires sont pèses lourds en impact environnemental), tout en récupérant une donnée personnelle qui vaut de l’or.

Culture Papier s’élève contre cette association systématique du papier au gaspillage, appuyée sur la rengaine du « jeté-sans-être-lu » utilisée pour tous les usages du papier, de la facture à l’imprimé publicitaire, et bientôt à l’offre culturelle de la presse et de livres. L’association appelle à la vigilance des consommateurs, à ne pas céder aux poncifs martelés sans preuve sur la déforestation ; elle est due essentiellement à l’élevage ou la production de soja et d’huile de palme, à vérifier les systèmes de certification comme PEFC et FSC qui encadrent strictement l’approvisionnement de l’industrie papetière. Et considérer que cette ressource naturelle, renouvelable et recyclable doit être gérée avec efficacité et en évaluation comparative sérieuse avec le numérique.

Maintenir le choix d’usages

Aussi le décret d’application doit respecter et maintenir le choix du consommateur et ne pas lui imposer une digitalisation aveugle aux usages, aux contournements du respect de ses données personnelles, de d’engager une nécessaire sobriété numérique.
Le papier a d’incontestables atouts pour y contribuer.

Culture Papier, 7 mai 2021


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